En attendant de reprendre le micro pour une saison 2 (un jour !), nous avons décidé de continuer l’aventure sous une autre forme : une série d’articles publiés toutes les deux semaines sur vieillesenpuissance.com. Nous y explorerons des thèmes qui nous tiennent à cœur : les femmes et l’argent, l’âgisme, le travail, la culture et l’art.
Depuis que je suis en péri-ménopause, Instagram (et donc Meta) a visiblement flairé ma transition. OK, j’ai un ventre plus mou, plus de rides et un métabolisme qui ralentit. Mais j’en ai plus que marre que mon fil Insta soit un défilé incessant de publicités visant à me faire me sentir mal. On me bombarde d’offres pour des « algues drainantes », crèmes anti-âge, legging anti-cellulite et autres « pilules magiques » promettant de faire fondre la graisse de mon ventre « comme du beurre laissé dehors en été ». Meta utilise ma transition hormonale pour me refourguer des solutions miracles. Un modèle de prédation calculée déjà bien rôdé sur les adolescentes.
Les deux périodes de transitions hormonales qui marquent la vie des femmes sont des terrains de chasse privilégiés pour la prédation algorithmique. Pour les « vieilles » en péri-ménopause comme pour les adolescentes, le combat est le même : refuser que nos doutes et nos insécurités soient transformés en données lucratives pour vendre de la pub, qui plus est pour du charlatanisme.
La cour des miracles : quand Meta sert de vitrine aux charlatans
Le croisement de nos vulnérabilités — qu’il s’agisse de l’acné ou de la recherche de minceur extrême chez les adolescentes, ou du ventre mou, des kilos « en trop », des rides et du métabolisme ralenti chez les femmes en péri-ménopause — crée une cour des miracles numérique, remplie de charlatans qui vendent des pilules et des solutions miracle à des personnes trop crédules car vulnérables.
Bien sûr, les hommes ne sont pas épargnés par les marchands de miracles. Eux aussi sont désormais la cible d’un marketing algorithmique qui exploite leurs insécurités. Anxiété liée la calvitie, culte du corps et des muscles, injonction à « aller à la salle » pour être un « vrai mec », attention nouvelle à la coiffure ou aux fringues… Les plateformes ont flairé le filon. Quand nous étions ados dans les années 1990, les filles recevaient déjà des injonctions à la beauté et à la minceur par les médias, tandis que les garçons étaient relativement épargnés. Au lieu de nous libérer collectivement de ces angoisses, c’est l’inverse qui s’est produit : ce sont eux qui nous ont rejointes du côté des cibles (et victimes) du charlatanisme.
Non seulement Meta surfe sur nos insécurités, mais en plus la plupart du temps pour vendre du grand n’importe quoi. Les publicités, souvent dites par des voix d’IA, agrémentées d’une musique « épique » (façon film de science-fiction qui annonce un bouleversement technologique ou civilisationnel), promettent de passer de faire « évacuer sans effort 8 kg de poids hormonal » en quelques semaines, de « dissoudre la graisse ancienne et collée », de « repulper la peau du visage comme si vous aviez 10 ans de moins », etc.
Ces promesses spectaculaires sont pourtant régulièrement dénoncées comme étant trompeuses et fallacieuses. Les bienfaits de ces produits, vendus à prix d’or, n’ont pas été jugés supérieurs à ceux d’un placebo. Mais rien n’y fait. Instagram nous inonde de promesses miracles. Ces pratiques, pourtant encadrées par la loi contre la publicité mensongère, prospèrent dans une zone grise où le marketing et le témoignage personnel se confondent.
L’exploitation des adolescentes : un modèle de prédation avéré
Meta a déjà été publiquement mis en cause pour la manière dont ses plateformes traitent les utilisateurs les plus jeunes, prouvant que l’entreprise n’hésite pas à capitaliser sur l’instabilité émotionnelle. Sarah Wynn-Williams, ancienne salariée de Facebook, a révélé que Meta ciblait les adolescentes âgés de 13 à 17 ans avec des publicités basées sur leur état émotionnel. L’entreprise considérait ce groupe vulnérable comme « très précieux » pour les annonceurs. Meta pouvait identifier quand les adolescentes se sentaient faibles, inutiles ou en échec, et partageait allègrement ces informations avec les annonceurs. (J’emploie l’imparfait mais on pourrait sans doute employer le présent).
La logique était d’un cynisme absolu : les annonceurs ciblaient les adolescentes lorsqu’elles se sentaient mal, car elles étaient alors plus susceptibles de faire des achats. Par exemple, si une adolescente effaçait un selfie, des publicités pour des produits de beauté lui étaient immédiatement proposées, partant du principe qu’elle était en proie à des doutes sur son apparence. De même, les adolescents souffrant de problèmes d’image corporelle étaient bombardés de publicités pour la perte de poids. Bien que Meta ait nié ces affirmations, les décrivant comme « éloignées de la réalité et truffées de fausses allégations », les révélations de l’ancienne dirigeante sont plutôt crédibles.
Ces pratiques de ciblage émotionnel ne sont qu’une facette de la prédation de Meta. Les outils d’Instagram conçus pour protéger les adolescents face aux contenus nuisibles ont échoué à les empêcher de voir des publications sur le suicide et l’automutilation. Et l’algorithme d’Instagram a été accusé d’inciter les enfants de moins de 13 ans à adopter des « comportements sexualisés risqués » pour obtenir des likes et des vues.
La ménopause : l’autre filon en or des charlatans
La même logique prédatrice que celle utilisée contre nos filles et petites-filles est retournée contre nous, les femmes en périménopause et ménopausées, par l’intermédiaire des algorithmes qui nous inondent de publicités ciblant nos vulnérabilités. Meta a bien identifié le marché de la ménopause comme une source massive de revenus. Les systèmes de détection (ciblage avancé) repèrent notre phase de transition et c’est open bar pour les annonceurs. « Régulateurs d’hormones », « algues drainantes » et « détox miraculeuses »– ces entreprises exploitent sans vergogne nos complexes. Quitte à en rajouter sur les attributs négatifs, parmi lesquels (je n’invente rien) les « joues de hamster », « mentons flasques », « cous de dinde », « ventres gonflés » ou encore « seins affaissés ».
Un exemple frappant de cette exploitation se trouve dans les campagnes de l’entreprise australienne de « nutraceutiques » Happy Mammoth. Cette société a été critiquée en Australie pour ses campagnes marketing à coups de milliers de publicités promettant aux femmes des « transformations physiques spectaculaires et une perte de poids rapide sans modifier leur mode de vie, leur régime alimentaire ou leur niveau d’activité ». Ce qui rend cette exploitation d’autant plus révoltante, c’est le vide scientifique derrière les promesses. Des experts, y compris l’ancienne présidente de l’International Menopause Society, les ont dénoncé comme « trompeuses ». Il n’existe aucune preuve que ces suppléments aient un quelconque effet (pas plus qu’un placebo).
Ces annonceurs utilisent des techniques d’entonnoir de vente, avec des « quiz hormonaux GRATUITS » qui offrent une « recommandation urgente » avant de diriger les clientes vers des achats coûteux (environ 60 € pour un mois d’approvisionnement chez Happy Mammoth, par exemple).
Dire m…. à Meta
Que l’on soit une adolescente ciblée pour des publicités de régime, ou une femme ménopausée bombardée par des publicités promettant d’effacer son « cou de dinde », le dénominateur commun ici, c’est Meta. Adolescentes ou péri-ménopausées, on en a marre d’être prises pour des cruches ! Ces publicités mensongères et prédatrices ne devraient-elles pas être sanctionnées ? Nos corps en mutation, à tout âge, ne sont pas une série de « défauts » à monétiser !





Hey, merci pour cette lettre Laetitia et Carolinr ! Je filoute l'algo en ayant plusieurs comptes sur Insta : un pour ma Gynette (@gynette.media) et un pour moi (@Ingridissima) : cela me permet de garder mon fil orienté voyage slow, vanlife, déco, et féminisme ! Avec le compte Gynette je vois en effet passer de nombreux produits "tout pourris", qui profitent à mort du marché juteux qui s'ouvre avec nos vulnérabilités de quadras/quinquans en plein bor**l hormonal.